Je suis Winnie l’Ourson À travers une manipulation ironique de l’identité, Je suis Winnie l’Ourson veut susciter une réflexion sur la stigmatisation de l’Autre mettant en scène les peurs et les contradictions qui y sont liées. Construction historique et culturelle, l’identité, comme nous l’enseignent les anthropologues, est fluide, multiple, ouverte et contextuelle. Chacun de nous peut en posséder plusieurs jusqu’à l’infini : « Une, aucune et cent milles » pour Pirandello. Mais l’identité est avant tout relationnelle : la définition du Nous passe toujours par la négation de l’Autre. Quand elle tombe dans les mains d’ambitions politiques, les identités se rigidifient sous forme de régionalisme, de fanatisme religieux, politique ou territorial. Et quand l’autre est marginal ou précaire, les conséquences immédiates sont l’exclusion et la violence. Rome, la ville où est né le projet, est un vivier de micro identitarisme qui se réfère à une romanitude fantasmée. La ville est le théâtre d’une vague d’intolérance et de violence ouverte contre une partie de la population qui incarne une altérité crainte et refusée. Figures marginales, travailleurs au noir, sans papiers… sur leurs identités complexes et variées, on colle une étiquette qui simplifie, dénigre et nie l’autre. J’ai observé et reproduit des scènes que j’ai vues dans la ville et dans la banlieue de Rome : ici une femme de ménage transylvanienne à qui j’ai parlé dans un hall d’immeuble ; là un pompiste pakistanais qui m’a servi à la nuit tombée quand les travailleurs réguliers sont partis se reposer. Dans leurs vêtements, j’ai glissé des costumes de super héros, des personnages de dessin animé ou d’icônes connues de tout le monde. Pour se rappeler qu’une personne n’est jamais ce que nous en voyons, mais toujours quelque chose de plus complexe et en mouvement, que chaque identité est partielle, que nous sommes tous un, aucun et cent mille. |